Le temps des fêtes à Sainte-Brigitte, autrefois

Grâce au livre, La Civilisation traditionnelle des Lavalois écrit par Soeur Marie-Ursule, nous pouvons connaître comment nos ancêtres vivaient le temps des Fêtes.

La Société d’histoire de Sainte-Brigitte-de-Laval vous présente ici des extraits de ce livre.

Noël à Laval est une fête religieuse  

Puisque la neige s’est amoncelée dans les chemins, les Lavalois viennent à la messe de Minuit en traîneaux, en carrioles ou en cutters. S’il fait froid, la neige durcie crisse sous les patins des traîneaux; sur toutes les routes, on entend le son des grelots dans la nuit. On détèle les chevaux au magasin général. Parmi les jeunes, il y en a qui viennent en skis.

À minuit moins vingt, la cloche fait entendre son premier appel. Autrefois, on jouait un petit drame dans l’église. Un peu avant minuit, dix anges apparaissaient et allaient en procession autour de l’église en chantant : Les anges dans nos campagnes. Arrivés à la crèche, ils y déposaient l’Enfant-Jésus. Les bergers arrivaient, habillés en peau de mouton et en jouant de la flûte. Un ange leur apparaissait et comme les bergers tentaient de s’enfuir, il les rassurait en disant : « Ne craignez rien, je viens vous annoncer une grande nouvelle : Un sauveur est né ». Tandis que les bergers allaient adorer à la crèche, les anges chantaient : Ça bergers assemblons-nous. C’est Mme Wilbrod Giroux et Mme Joseph-Édouard Sanschagrain (deux anciens anges) qui nous ont décrit ce petit drame. Cette coutume a été abandonnée vers 1918.

Vers 1945, la cérémonie est très simple. À minuit, M. le curé illumine la crèche. C’est M. Léandre Touchette, celui qui creuse les fosses et s’occupe un peu de l’église, qui a fait la crèche cette année (1945) nous a dit une Lavaloise Mme Maurice Thomassin. C’est Mme Léopold Brindamour qui a arrangé la crèche; elle s’en occupe depuis vingt-deux ans.

En ce temps, il y avait la messe de minuit, la messe de l’aurore et la messe du jour à sept heures du matin. Après la messe de l’aurore les gens vont réveillonner chez des parents. On se met autour de la table sur laquelle se trouve  une grande abondance de provisions : du ragoût, des tourtières, des patates, des croquignoles, des fruits, des gâteaux, des tartes et des bonbons. « On a bu des liqueurs douces, pas de boisson » nous a confié Mme Jules Fortier. Après le repas, on distribue les étrennes laissées par le Père Noël.

La nuit de Noël, les Lavalois veulent conserver l’aspect religieux de cette fête. Désireux de savourer chaque minute de cette nuit solennelle, on jase jusqu’au matin. Alors « on fait le train » et on se couche.  

Le jour de Noël est une journée paisible passée en famille. Dans plusieurs maisons, au repas du midi, on trouve encore la coutume de manger un gâteau qu’on appelle « bûche de Noël » parce qu’il imite une petite bûche de bois. Suivant la tradition, Noël est le signal, semble-t-il, du commencement des fêtes. Pour toutes les familles, sauf les enfants qui sont en congé, ces jours entre Noël et le Jour de l’An sont chargés. Apprêter l’ordinaire du Jour de l’An ne laisse aucun loisir.

Le Jour de l’An

Le Jour de l’An ramène chaque famille chez « memére et pepére ». On s’y prépare depuis des semaines. En faisant boucherie avant l’Avent, on met de côté les meilleurs morceaux de bœuf, porc, volailles, dindes et lièvres pour cette fête. Les femmes passent deux semaines à faire pâtisserie, tourtières, ragoût, gâteaux, puddings. Au Jour de l’An, tous les enfants s’agenouillent devant leur père et lui demandent sa bénédiction. Après que chacun se soit souhaité une bonne année, ils se mettent à table. Le petit déjeuner est un festin. Les enfants sont très joyeux. Il est bientôt l’heure de la messe. Vite, on attelle le cheval au traîneau et on embarque. En chemin, on se joint au défilé ininterrompu de traîneaux en route vers l’église.

En arrivant, on trouve les fidèles assemblés en groupe sur le perron de l’église et on entend les salutations joviales, mêlées aux souhaits de bonne et heureuse année. Les Lavalois ont une très bonne manière de se souhaiter la nouvelle année. La formule varie selon les personnes.

Pour une fille : « je te souhaite une bonne année, la santé et que tu trouves un mari » ! Pour un homme : « Beaucoup d’argent et un heureux mé-
nage ». Pour les mères de famille : « Que tu achètes encore cette année », « la santé et la patience pour élever ta famille » et « la santé pour toi et ta famille ». Pour les pères de famille : « la santé pour gagner ta vie et la patience pour élever tes enfants ». Pour tout le monde la plus populaire : « une bonne année, bonne santé et le paradis à la fin de tes jours ».

Ensuite, on prend place à l’église pour la messe, le sermon du curé, l’Évangile et finalement la bénédiction.

La messe finie, les familles se réunissent à la demeure de l’aïeul et on passe à table. Chacun boit à la santé de l’autre et les femmes servent les copieuses assiettes de bœuf rôti, dinde, betteraves marinées et beaucoup de conserves domestiques. Devant chaque couvert, il y a une bouteille de vin. On se paye la traite.

Le souper est chez « memére et pepére » à maman et c’est encore un banquet. On chante et on danse. Il est bientôt onze heures. Les petits enfants s’endorment. La journée a été longue pour eux !

On allume le fanal et les hommes vont à l’écurie atteler les chevaux. Les mamans et enfants embarquent. Elles les « abrient » avec des couvertes ou une peau de fourrure. Un coup de fouet au cheval et voilà tout le monde est parti. Encore un Jour de l’An qui s’achève.