Bobby Fournier, forgeron

Il faut battre le fer quand il est chaud.

Cette formule remonte loin dans l’histoire humaine. La découverte du feu puis de son utilisation par les hommes a amené différents métiers comme ceux de la céramique et de la forge. Quand on revisite les« greniers de l’histoire », on découvre ainsi un  très vieux métier qui nous ramène vers un art essentiel, encore aujourd’hui.

« I forge on Wheels »

L’objectif de ma rencontre avec monsieur Bobby Fournier que j’ai croisé au marché d’été de SBDL était de remettre à l’honneur ce métier et cet art pour lequel mon interlocuteur a le feu sacré... celui d’un passionné qui se déplace avec son enclume, son mini four de forge, ses créations et ses outils. Gamin, je pouvais me rendre chez le forgeron de mon petit village et je n’ai pas oublié ces sons métalliques qui sortaient de l’atelier aux portes ouvertes.

Ce jeune menuisier charpentier a répondu à mes nombreuses questions pour mieux vous le faire connaître, non seulement comme artisan et artiste, mais aussi comme homme. Il est natif de La Tuque et ses parents, Ghyslaine Lapointe et Ghyslain Fournier, ont mis au monde Tommy, son jumeau, et deux frères plus âgés, André et Jacky. Âgé d’un an, le jeune Bobby doit quitter avec ses parents et ses frères pour l’Ontario. Là, il a pu apprendre l’anglais.

Donc, après La Tuque, Bobby Fournier a effectué son primaire en langue française. Son passage en classes secondaires s’est déroulé en Ontario. La formation policière qu’il a voulu suivre s’est effectuée en langue anglaise, ce qui explique qu’il lui soit plus facile de communiquer en anglais que d’écrire en français.

Démarches professionnelles

Ne pouvant accéder à l’emploi souhaité au regard du respect des critères d’équité retenus lors de la recherche d’emploi dans sa région, il s’est tourné vers les forces armées à titre de policier. Cependant,  cette possibilité imposait six mois d’attente. 

Notre homme a alors choisi la profession d’ingénieur de combat au sein de l’armée et c’est ainsi qu’il connaîtra les camps militaires canadiens de Borden, Gagetown et finalement Valcartier. Bobby me confie qu’il a ensuite quitté les forces armées après qu’un gars l’ayant remplacé lors d’un déploiement en Afghanistan y ait péri. 

Plus tard, d’autres de ses compagnons ont vécu la même chose. Nous pouvons imaginer ce que ces expériences ont comme conséquences dans la vie d’un « survivant »...

Le Québec

« J’ai alors tenté de devenir policier au Québec mais, mes formations académiques étant insuffisantes à leurs dires, on m’a conseillé de transiter par le Service d’Immigration. Puis, plus tard, fort de mon expérience ontarienne, j’ai opté pour la formation professionnelle de mon père, soit menuisier charpentier. Ce métier me permet de choisir des à-côtés, telle la forge... »

La pomme nommée Bobby n’est pas tombée loin du pommier. Il a ajouté cette « corde à son arc » parmi d’autres, dont cette aventure modeste qu’il commence à ... FORGER. « Je cherchais un passe-temps masculin ». 

  

La forge  roulante 

« C’est en forgeant que l’on devient forgeron ». Cette courte maxime est bien connue de la majorité des gens. Boileau écrivait, il y a bien longtemps :  « Vingt fois sur le métier, remettez votre ouvrage, polissez-le sans cesse et le repolissez ».

Encore chaud, le four doit refroidir pour être emporté.

Celui qui rêvait d’une forge roulante et d’un camion atelier a dû se résigner car trop cher pour ses moyens actuels.  Il voyage donc avec le minimum dans sa boîte à outils et son auto.

Bobby est pragmatique 

« Mon opinion est qu’un artiste porte un regard particulier sur la réalité qui ne correspond pas nécessairement au mien. Ce n’est que mon opinion, ajoute-t-il, mais bon ». Il aime ce qui est concret et réaliste.

« J’aime quand même les belles choses et je sais les apprécier, mais comme je le dis, je préfère une personne qui fait un portrait réaliste des choses. J’aime développer un produit, et comme un casse-tête, trouver des façons de rendre tout plus rapide et efficace en fabricant des outils et en mettant au point des techniques nouvelles. »

Ayant donc commencé à s’intéresser à la forge, il a travaillé un peu à tâtons au départ et sa force d’autodidacte lui a permis d’apprendre sur le tas. « J’ai donc développé quelques produits, appris à tremper l’acier.* » Il a aussi appris à marteler, à façonner de petits objets dont certains, utilitaires, présentent des courbes magnifiques et témoignent de la grande sensibilité de Bobby.

Les couteaux

Notre forgeron a tâté du métier de coutelier pour ensuite s’en éloigner car le travail lui semblait trop monotone. Je souhaite qu’il s’inspire des grandes marques de couteaux tels les trésors Opinel ou ceux de la Maison Laguiole et de sa petite abeille qui le singularise. Qui sait, un jour nous pourrons peut-être compter sur une marque fabriquée chez nous.

Bobby aime mieux les finis forgés et le martelage sur le fer. Mais ses productions sont éminemment esthétiques et utilitaires. J’ai opté pour une petite feuille de métal  ouvragé qui était présentée sous la forme d’un porte-clés. Des crochets magnifiques, des esses, présentaient leurs courbes harmonieuses parmi les productions forgées étalées sous nos yeux.

 

Une sculpture pour son quartier ?

J’ai demandé à Bobby s’il pensait qu’il pourrait réaliser une sculpture importante pour son secteur ou un autre de Sainte-Brigitte-de-Laval, à l’instar de ce que l’on peut admirer dans d’autres villes et d’autres régions. « Oui,  m’a-t-il répondu, je jongle avec l’idée de réaliser quelque chose de gros, mais les matériaux et le temps nécessaires pour produire quelque chose de plus important demeurent pour moi un risque non négligeable, ne pas le vendre, voire de ne pas le terminer.» Et d’ajouter dans la foulée : « Eh oui, une belle sculpture, j’aimerais bien, mais je préférerais suivre un dessin, une idée. » 

Une sculpture dans chacun des six secteurs serait déjà une sacrée belle innovation et donnerait à notre jeune ville une visibilité additionnelle. Si nous tenons à nos artistes, il faut les reconnaître, ils sont nombreux en maints domaines. 

Il devrait y avoir une association lavaloise  pour tous nos artistes. Serait-ce un rêve réalisable à Sainte-Brigitte-de-Laval ?...

Bobby Fournier 

418 606-8701   

iforgeonwheels@hotmail.com

www.etsy.com/shop/I-Forge-On-Wheels

Bonne route Bobby Fournier !

Que tes souhaits se réalisent !