Bataille contre les néonicotinoïdes

Les scientifiques accusent ces produits chimiques d’affaiblir les abeilles et de les rendre plus vulnérables aux maladies et aux intempéries. Même le gouvernement du Canada reconnaît leur impact néfaste sur les abeilles. En plus des pollinisateurs, ces produits neurotoxiques menacent les vers de terre, les oiseaux et les poissons.

Une étude québécoise démontrait leur effet sur la santé humaine. On retrouve une quantité importante de résidus de ces insecticides dans le sol, les fleurs sauvages et les cours d’eau.

Une étude publiée dans la revue Science, en 2017, démontrait la présence de ces pesticides dans 75 % des échantillons de miel collectés dans le monde (86 % en Amérique du Nord). Et en Europe, le 27 avril 2018, la Commission européenne votait en faveur de l’interdiction de l’utilisation extérieure des néonicotinoïdes à toutes fins agricoles d’ici la fin de 2018.

Au Canada

En juin 2018, au Canada, l’utilisation de ces produits n’était pas encore restreinte. On en retrouvait dans presque toutes les cultures de maïs, de canola et une grande partie du soya. Les néonicotinoïdes utilisés au Canada sont entre 5 000 et 10 000 fois plus toxiques que ne l’était le DDT qui a été interdit dans les années 1970, selon les chercheurs.

En mai 2018, était annoncée l’intention d’éliminer progressivement dès 2019 le troisième pesticide de type néonics, l’imidaclopride, pour tous les usages extérieurs.

Le 15 août 2018, Santé Canada annonçait l’élimination de deux types de pesticides néonicotinoïdes (clothianidine et thiaméthoxame), connus pour avoir été liés au déclin des abeilles.

L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) souhaite qu’ils soient interdits d’ici trois ans dans les secteurs où des solutions de rechange existent, et d’ici cinq ans là où il n’y en a pas. Les groupes environnementaux disent se réjouir de voir le Canada interdire ces pesticides, mais estiment que le délai de cinq ans avant que les néonicotinoïdes soient complètement bannis est trop long.

Au Québec

Le 18 septembre dernier  le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, déclarait  qu’un lien devait être maintenu entre l’industrie des pesticides et la recherche pour aider les cultivateurs et qu’il faudrait des échanges entre les gens qui expérimentent la réalité tous les jours (cultivateurs) et les gens qui essaient, avec leurs pesticides, de les aider à confronter cette réalité-là.

Commission parlementaire sur les pesticides

Du 23 au 26 septembre 2019 s’est tenue, au Québec, la Commission parlementaire sur les pesticides pour étudier les effets des pesticides sur la santé publique, les pratiques de remplacement de ces produits toxiques et sur la compétitivité du secteur agroalimentaire. Durant trois jours, les élus ont entendu les témoignages de 26 organismes et experts.

Équiterre a été le premier groupe à témoigner devant la commission. L’organisme a plaidé que pour réduire la dépendance aux pesticides, il faut d’abord se défaire de la dépendance à l’industrie. L’organisation a aussi proposé l’adoption d’une mesure pour protéger les lanceurs d’alerte.

Louis Robert, agronome

N’oublions pas que la commission a été mise sur pied à la suite de l’affaire Louis Robert, cet agronome du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) qui a dénoncé dans les médias l’influence des lobbys de l’industrie des pesticides et des producteurs au sein du Centre de recherche sur les grains.

Le 24 janvier 2019, Louis Robert est congédié à la suite de fuites journalistiques; le 1er février, le  Protecteur du citoyen déclenche une enquête. Le 3 avril, Québec donne raison à Louis Robert et annonce une nouvelle politique pour protéger l’indépendance des chercheurs financés par l’argent public.

Enfin, le 13 juin 2019, le ministre André Lamontagne propose à Louis Robert de réintégrer son emploi, mais refuse de s’excuser.

Principe de précaution

À l’instar de l’Europe, Québec devrait appliquer le principe de précaution avant d’utiliser ou de mettre en marché de nouveaux pesticides dans le secteur de l’agriculture, recommandent des chercheurs de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) qui ont porté une attention particulière à l’atrazine, un herbicide, et aux néonicotinoïdes (« néonics »), montrés du doigt comme étant des pesticides « tueurs d’abeilles ».

« C’est seulement un petit échantillon des effets sur la santé humaine et environnementale qui ont été mesurés par les chercheurs de l’INRS », précise la chercheuse.

Ils ont remarqué que les pesticides fréquemment utilisés au Québec agissaient comme des perturbateurs endocriniens, que l’atrazine rend les amphibiens plus vulnérables aux infections parasitaires.

Le mémoire conclut également que les néonicotinoïdes contribuent au déclin des populations d’abeilles et d’insectes pollinisateurs, que chez l’humain, ils peuvent également être reliés à des cas de cancers du sein et de l’ovaire, en plus de perturber des hormones liées au développement intra-utérin de l’enfant.

Les élus ont essayé de trouver un équilibre entre la diminution de l’utilisation des pesticides et la rentabilité des entreprises agricoles. Le ministre Lamontagne a indiqué que 30 centres de recherches effectuent présentement 125 études pour trouver des alternatives aux pesticides.

Le rapport final est attendu d’ici la fin de l’année 2019 ou au plus tard au début de 2020.

Références:


https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1118112/canada-pesticides-neonicotinoides-abeilles-elimination-agriculteurs

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1102943/justin-trudeau-abeilles-canada-neonicotinoides-pesticides-science


https://www.tvanouvelles.ca/2018/08/15/des-agriculteurs-craignent-de-devoir-retourner-a-des-pesticides-plus-toxiques


https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1312055/quebec-agriculture-environnement-alimentation-equiterre


https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1168168/congediement-louis-robert-lanceur-alerte-mapaq-coulisses-pesticides-cerom


https://www.msn.com/fr-ca/actualites/quebec-canada/le-ministre-lamontagne-nest-pas-en-guerre-contre-lindustrie-des-pesticides/ar-AAHuTo3?ocid=spartandhp