Un paysan de rien, sans un bout de terre, se contentait de regarder la terre! Il ne faisait RIEN.

La terre était son livre de la science du bien et du mal. Il passait des heures à l’apprendre. Il ne faisait rien. Il passait sa vie à contempler, à observer, à regarder et on le prenait pour un paresseux.

Mais, cinquante ans plus tard, on le prend pour un sage.

Pour lui, la chélidoine était l’herbe aux hirondelles. Personne ne l’a jamais employée comme lui. En usage externe, on se sert de son suc sur les verrues, comme anti-ophtalmique et sur les tumeurs scrofuleuses, les ulcères sordides scorbutiques et atoniques.

Il racontait qu’il avait découvert une des vertus de cette plante en observant un nid d’hirondelles sous le toit de la maison :

« Je voyais la mère qui apportait un brin de chélidoine à son nid. Ce n’était pas pour le donner à manger à ses petits, alors pourquoi ? »

À force de patience il a fini par comprendre. L’hirondelle tenait dans son bec la plante et la frottait contre la tête d’un petit, toujours le même, celui dont les yeux étaient restés fermés. Quand ils se sont enfin ouverts, l’hirondelle n’a plus apporté de chélidoine.

Ce qui étonnait le plus les gens, c’était sa manière de vivre, on disait : « Ey a leu tens ». Lui, il a le temps!

Je le revois encore à plat ventre dans les prés, à l’orée du bois, passant des heures à regarder les lapins, les lièvres qui n’avaient pas peur de lui. Il disait : « Ce n’est pas en courant dans tous les sens, sur tous les chemins, qu’on apprend la vie. C’est en la regardant et eux, ils en savent plus que nous. Ils connaissent les plantes, ils connaissent les herbes, les bonnes et les mauvaises, ils savent comment se nourrir avec, comment se soigner. »

Il avait raison. Un animal sauvage vivant en liberté ne s’empoisonne pas, il fait son choix. C’est un instinct qu’ils perdent quand ils sont domestiqués, qu’on leur apporte de la nourriture, qu’ils n’ont plus à la chercher, à la défendre et qu’on appelle le vétérinaire quand ils sont malades. Un lapin en clapier ne distingue plus les dangers du mouron rouge et il en crève, un chat en appartement mange du muguet qui est très dangereux pour lui.

Je trouvais tout ça très simple. Trente ans plus tard, j’ai compris que derrière cette simplicité se cachait la sagesse, celle que donne la connaissance. Celui qui raconte cette histoire merveilleuse s’appelle Maurice Mességué.

Il a été l’un des plus grands herboristes français jusqu’à sa mort, en 2017.

Et s’il a pu acquérir son immense connaissance des plantes, s’il a pu les assembler dans des remèdes qui l’ont rendu célèbre dans le monde entier, c’est grâce à son père, ce paysan qui se contentait d’observer la nature.

Ainsi cet homme qui ne « faisait rien », en apparence, a planté une graine dont le fruit jaillirait des décennies plus tard, pour le bénéfice de milliers de malades.

Maurice Mességué (né le 14 décembre 1921, décédé le 16 juin 2017) était un passionné d’herboristerie et écrivain français qui a contribué à vulgariser l’utilisation des plantes médicinales auprès du grand public dans les années 1970 par de nombreux ouvrages. Il est considéré comme l’un des précurseurs en Europe de la phytothérapie, anticipant de plusieurs années un mouvement vers un retour à l’utilisation des plantes en matière de bien-être et de beauté (suite sur Wikipédia).
 
Ce n’est pas en courant dans tous les sens, sur tous les chemins, qu’on apprend la vie. C’est en la regardant...

Maurice Mességué le « Pape des plantes » est décédé.

Pionnier de la phytothérapie, écrivain, homme politique, dirigeant de clubs de rugby : dans tous ces domaines, Maurice Mességué, décédé vendredi 16 juin 2017 à l’âge de 95 ans, laissera une empreinte indélébile dans notre région. (ladepeche.fr)

Patron des laboratoires « Les herbes sauvages », maire et conseiller général de Fleurance (Gers), président de la CCI (Chambres de Commerce et d’Industrie), Maurice Mességué a marqué le Gers./DDM

Réf. : Gabriel Combris - Lettre Directe Santé, 25 mars 2020